Le vol des corbeaux – ou la science des relations à l’oeuvre.

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Rook Tree, 1999, Nat Morley

Ce billet fait suite à plusieurs questions à propos de deux concepts de la pédagogie Charlotte Mason: l’inactivité magistrale, et la « science des relations ». Je vais tenter de les illustrer par ce petit récit en guise d’exemple.

Cela faisait plusieurs semaines que sur le parcours qui l’amène à ses cours de musique, mon fils observait d’impressionnants groupes de corbeaux (ou tout du moins des corvidés). C’était toujours au moment du crépuscule. Les oiseaux volaient haut dans le ciel et tous dans la même direction. Il les a d’abord observé silencieusement à l’arrière de la voiture, puis sont venues des interrogations: Ils se dirigent tous vers le sud-ouest, me disait-il, pourquoi? Migrent-ils? Ce ne sont pourtant pas des oiseaux migrateurs. Et en plus ce n’est pas la bonne direction… Sentant qu’il n’attendait pas forcément que je lui réponde, j’ai laissé ses questions en suspend. Lire la suite

L’inactivité magistrale II: Le pêcher et la porteuse d’eau…

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Pour poursuivre ma série de billets sur le thème de l’inactivité magistrale, je me suis inspirée de deux métaphores que Mason emploie pour illustrer cet idéal vers lequel un parent devrait tendre selon elle. Elles m’ont beaucoup aidé à mieux comprendre ce concept et j’espère qu’elles seront aussi parlantes pour vous…

Le pêcher – ou de l’intérêt des bonnes habitudes 

Mettons un noyau de pêche en terre. Il germera, grandira rapidement et, deux étés plus tard, nous offrira ses premiers fruits. Mais tout au long de sa croissance, nous jardiniers, lui apportons engrais et soins, le protégeons du froid et des plantes envahissantes, l’arrosons, le taillons et le tuteurons. Mais ces interventions occupent qu’une petite fraction de l’existence du petit pêcher. Car le reste du temps nous laissons la nature, l’air, le soleil et la pluie faire leur oeuvre. Le résultat?  De beaux fruits juteux. Mais si au contraire nous ne jouerions pas ce petit rôle dans la croissance de l’arbre, nous récolterions de petits fruits durs et amères. (D’après Home éducation – vol. 1, page 134). Lire la suite

L’inactivité magistrale – I : L’enfant et la Nature

Charlotte Mason n’avait pas d’enfant, mais c’est peut-être justement ce fait qui lui donna le recul nécessaire pour cerner et analyser très finement les interactions entre les parents (plus particulièrement les mères) et leurs enfants. Quand on étudie ses écrits, on découvre une méthode d’éducation douce mais ferme, simple, qui respecte la nature de l’enfant mais aussi les besoins du parent instructeur.

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Une des idées clé de la philosophie de Charlotte Mason est ce qu’elle appelait « l’inactivité magistrale » (masterly inactivity ou wise pasiveness). Il s’agit d’une attitude morale du parent ou de l’enseignant et qui s’applique à tous les domaines de l’éducation. Il s’agit de l’art de laisser grandir et évoluer l’enfant selon sa propre nature. Mason parle de letting children be,  littéralement de « laisser les enfants être ».  Mais qui n’a rien à voir avec le « laisser faire »!  C’est la capacité qu’a le parent à prendre du recul, à s’effacer même, afin que l’enfant puisse être et devenir le meilleur de lui même, tout en étant discrètement guidé et orienté par l’adulte, en accord avec ses valeurs morales. L’adulte cherche à entraver le moins possible les relations que l’enfant tisse avec son environnement et ses apprentissages. Lire la suite